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Γενικά θέματα 3 Ιουνίου 2010

Israël et la Turquie, la fin d’une époque, par Alain Frachon

Ce qui s’est passé cette semaine au large de Gaza confirme un revirement majeur au Proche-Orient : la fin de la relation privilégiée entre Israël et la Turquie. C’est un moment-clé. Il marque l’aboutissement d’une évolution amorcée il y a quelques années : Ankara prend ses distances à l’égard de son vieil allié, pour se rapprocher du monde arabe.

Afin de devenir une puissance régionale, politique et économique, la Turquie s’émancipe de sa diplomatie traditionnelle. Elle n’est plus seulement ce membre sage de l’OTAN, proche des Etats-Unis, candidat à l’entrée dans l’Union européenne et signataire d’un accord stratégique avec l’Etat juif. Elle aspire à un profil diplomatique plus complexe – celui d’une de ces puissances émergentes qui, comme le Brésil, l’Indonésie ou l’Afrique du Sud, sont en passe de changer les rapports de force internationaux.

Dans l’opinion arabe, la Turquie sort grandie de l’abordage par des commandos israéliens, le 31 mai, d’une flottille humanitaire qui voulait forcer le blocus du territoire palestinien de Gaza. Les corps de neuf militants tués lors de l’assaut sont arrivés jeudi à Istanbul, ainsi que des blessés.

L’initiative de cette opération “Libérez Gaza” a été le fait d’une ONG turque, IHH, qui ne cache pas que son objectif était au moins autant politique – marquer un point contre Israël – qu’humanitaire – apporter de l’aide au million et demi de Palestiniens de Gaza. Plus important, cette ONG n’a pu passer à l’action qu’avec le feu vert implicite du gouvernement turc.

Ankara a rappelé son ambassadeur en Israël ; la Turquie a évoqué une possible rupture des relations diplomatiques. Le premier ministre Recep Tayyip Erdogan, qui dirige le parti islamo-conservateur AKP, a, sans trop d’égards pour la réalité des faits, accusé les Israéliens d’avoir “massacré des innocents de sang-froid”.

Rien n’est jamais définitif entre les Etats, mais les relations israélo-turques ne seront plus ce qu’elles furent longtemps. Pour les Israéliens, c’est un bouleversement, la fin d’une époque où Ankara était leur allié principal dans le monde musulman. Face à l’hostilité de leurs voisins immédiats, les fondateurs d’Israël se sont appuyés sur les deux pays musulmans non arabes de la région : l’Iran et la Turquie. La révolution islamique de 1979 a mis fin à la relation avec Téhéran. Mais avec la Turquie, les liens se sont resserrés, jusqu’à la signature d’un accord de coopération stratégique en 1996.

La dégradation s’est faite lentement, provoquée par l’absence d’avancée dans la négociation israélo-palestinienne et par le cours nouveau d’une politique étrangère turque qui, progressivement, portait la marque de l’AKP et s’affranchissait de ses lignes traditionnelles.

C’est une diplomatie qui privilégie le bon voisinage avec les voisins immédiats de la Turquie : amélioration des relations avec la Grèce et l’Arménie, avec l’Iran et avec le monde arabe. C’est aussi “une diplomatie du business”, dit une spécialiste de la Turquie, Ariane bonzon : “M. Erdogan ne voyage jamais sans une cohorte d’hommes d’affaires”, VRP d’une économie turque plus dynamique que jamais.

En Irak, Ankara a su développer ses liens avec Bagdad et, plus important, avec la région autonome kurde irakienne. Les Turcs ont longtemps regardé celle-ci avec hostilité parce qu’elle abrite des combattants indépendantistes kurdes de Turquie et qu’elle peut leur servir de modèle. Mais, diplomatie conjuguée du business et du bon voisinage oblige, Ankara a ouvert un consulat à Erbil, la grande ville du Kurdistan d’Irak. Avec la Syrie, les relations n’ont cessé de s’améliorer depuis que Damas n’appuie plus les indépendantistes kurdes turcs du PKK.

Au nom des bonnes relations retrouvées avec Damas, la Turquie a pu servir de médiateur pour patronner des négociations indirectes entre la Syrie et Israël. ” Erdogan a vraiment cru qu’il pouvait jouer un rôle pour rapprocher ces deux pays”, dit Arianne bonzon. Fin 2008, l’opération “Plomb durci” menée par Tsahal dans la bande de Gaza marque le début des tensions entre Israël et la Turquie.

L’opinion et la majorité parlementaire turques ont été choquées par l’intensité des bombardements israéliens ; M. Erdogan n’a pas apprécié de n’avoir pas été prévenu du déclenchement de l’opération au moment précis où il tentait de relancer sa médiation entre Israël et la Syrie.

A l’adresse des Palestiniens, la Turquie s’est faite de plus en plus chaleureuse : “Erdogan parle de “nos frères palestiniens””. Depuis mai, dit Arianne bonzon, “l’arabe est enseigné dans les lycées de Turquie”, un pays “où on ne parlait plus cette langue”…

Les réminiscences de l’Empire ottoman dans la mémoire arabe peuvent-elles peser contre le rapprochement avec Ankara ? Apparemment, il n’en est rien. La Turquie d’aujourd’hui serait même en passe de devenir une sorte de “modèle” pour les Arabes. Menée en janvier par l’institut turc Tesev (Turkish Economic and Social Foundation), une vaste étude d’opinion dans sept pays arabes donnait des résultats flatteurs pour la Turquie.

Avec 75 % d’opinions favorables, elle est le pays non arabe le plus apprécié dans le monde arabe ; 63 % jugent qu’elle a réussi la bonne “combinaison entre islam et démocratie” ; autant estiment que son adhésion à l’UE ne ferait que renforcer son aura au Proche-Orient.

Pour devenir l’un des acteurs-clés dans la région, la Turquie a rééquilibré sa relation avec les Etats-Unis. Avec l’AKP au pouvoir, elle s’est affranchie d’une manière de tutelle américaine. M. Erdogan entretient de bonnes relations avec l’Iran de Mahmoud Ahmadinejad ; il a exaspéré Washington en lançant avec Brasilia une médiation sur le nucléaire iranien. Il ne s’est pas opposé à l’entrée d’Israël à l’OCDE. Il tient une ligne délicate, complexe. Il veut tout à la fois être membre de l’OTAN, rester candidat à l’Europe, asseoir sa stature de Grand du Proche-Orient, être en même temps proche de l’Iran et du monde arabe, sans rompre avec Israël. Cocktail riche et explosif.

Courriel : frachon@lemonde.fr.
Alain Frachon-Le Monde

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